Le phénomène d’Aube Dorée en Grèce

(L'Ange Loup) emblème originel d'Aube Dorée [1]

(L’Ange Loup) emblème originel
d’Aube Dorée

2,007 mots

English original here [2]

Les récentes élections en Grèce ont envoyé des ondes de choc à tout le système politique grec à cause des presques 7% de votes que le parti d’extrême droite Xrisi Augi (Aube Dorée) a obtenu. Ce petit article essaiera d’expliquer au lecteur les raisons de ce succès et dans le même temps essaiera d’analyser l’idéologie politique d’Aube Dorée (AD), sa stratégie, son histoire, et ce que le futur lui réserve.

L’histoire

AD a été fondée au début des années 1980, en tant qu’organisation avec un programme purement national-socialiste. De vieilles interviews de magazines et de journaux de ses dirigeants étaient intercalées avec des photos de ses bureaux avec les murs couverts de svatiskas, de symboles runiques, et de portraits d’Hitler. Même dans les questions religieuses AD, selon les déclarations de son chef, adhérait à une forme d’hitlérisme ésotérique, influencé apparemment par les écrits de Miguel Serrano.

À l’époque bien sûr, AD ne participait pas aux élections et était surtout un petit club pour nationaux-socialistes. La ligne du parti était si fortement dédiée au National Socialisme que le journal officiel de l’organisation avait même dénoncé le régime fasciste de Metaxas comme ayant été une marionnette de la Grande Bretagne et considérait même le régime militaire de 1967-1974 comme une simple dictature militaire sans aucun fond idéologique sérieux. Totalement absents du journal et des publications de l’organisation étaient des articles écrits par

des penseurs nationalistes grecs. En d’autres termes, AD était politiquement étranger à toute forme de nationalisme grec et tenait ses racines du national-socialisme allemand. Nous n’exagérions pas si nous affirmions qu’à l’époque l’organisation donnait comme un culte à Hitler totalement séparé du reste de la société grecque.

Au début des années 1990, AD se fit connaître auprès du public par son activisme violent contre  l’extrême gauche, de plus il s’enregistra en tant que parti politique pour participer à la politique institutionnelle. Cette action fut un tournant crucial pour l’organisation, puisqu’elle muta finalement d’un club nazi vers un parti nationaliste. L’activisme anti-gauche était toujours un élément des activités d’AD, mais comme l’organisation croissait en nombre, elle chercha à “contrôler la rue” et à briser l’opposition de la gauche. Ses membres pouvaient être beaucoup moins nombreux que ceux des nombreux groupes d’extrême gauche, mais ils étaient en majorité des anciens membres des forces spéciales et rompus aux arts martiaux, ils avaient aussi une discipline de fer et un éthos martial. Caractéristiques, dont l’extrême gauche était évidemment dépourvue. Très vite, le nom d’AD devint la bête noire de la gauche et on trouvait dans les bureaux d’AD de multiples chaussures prises dans les combats de rue contre les gauchistes. Un tel activisme continua tambour battant jusqu’en 1997, où le chef adjoint de l’organisation fut accusé d’une attaque sauvage contre un étudiant de gauche et le système et les médias de gauche trouvèrent là, l’opportunité de réprimer l’organisation. Le milieu des années 1990 fut une période particulièrement importante pour AD, puisque sa hiérarchie réalisa qu’il serait impossible d’obtenir de quelconques victoires électorales en paradant en tant que parti national-socialiste. AD abandonna en ce sens tous les symboles nationaux-socialistes pour les remplacer par des symboles grecs. L’Ange loup, qui fut pendant des années l’emblème de l’AD, fit place au Meander grec ancien. Les svatiskas en drapeaux ont été remplacés par des drapeaux byzantins et grecs, et les portraits des dirigeants nationaux-socialistes disparurent des bureaux. Dans la foulée, le journal de l’organisation changea également, la couverture n’arbora plus de symboles nazis et ses sujets commencèrent à se recentrer sur l’histoire grecque et plus sur des sujets idéologico-politiques liés au national-socialisme et à l’Allemagne hitlérienne. Comme élément de la stratégie d’approche de la société grecque, AD fit aussi publier un journal hebdomadaire qui se concentrait  sur les problèmes de la société grecque contemporaine et ne mentionnait rien du passé national-socialiste d’AD.

Pendant les années 1990, le parti prit part aux élections avec de très faibles résultats, mais il gagna 5% des voix à la mairie d’Athènes pendant les élections municipales de 2010. Bien que cette petite victoire ait inquiété le système politique dès cette époque, pour la première fois, les représentants d’AD étaient élus, le vrai choc est venu des résultats des élections législatives de 2012.

Les causes du récent succès électoral 

Il y a trois causes majeures pour le succès électoral d’AD. D’abord, la chute du parti national-populiste dominant du LAOS qui jusqu’en 2012 avait presque monopolisé les suffrages nationalistes en Grèce. L’inconsistence des politiques du LAOS principalement attribuées à son chef ont poussé les électeurs et une grande partie de ses membres à abandonner le parti. En conséquence, le LAOS n’a pas réussi à dépasser le seuil nécessaire de 3% des électeurs pour entrer au Parlement et s’est plus ou moins désintégré après cet échec. Les électeurs traditionnels du LAOS ont voté en masse AD, puisqu’il n’y avait pas d’autre alternative crédible s’offrant à eux.

Deuxièmement, les politiques d’austérité drastiques des précédents gouvernements et l’incapacité du système politique grec de gérer la sévère crise économique en Grèce en plus d’autres questions telles que l’immigration illégale, mena à la désillusion d’une partie du public pour les politiciens majoritaires. On a estimé que des centaines de milliers de Grecs ont voté AD par pure réaction contre le système politique et parce qu’AD était considérée comme une organisation violente. Certains d’entre eux ont ouvertement déclaré dans des interviews qu’ils ont voté pour AD, dans l’espoir que ses membres commenceront à rosser les politiciens majoritaires au sein même du Parlement! En fait, certains incidents (comme le coup de point d’un député communiste par un député d’AD dans une émission politique) prouva que plus violent se montrait les membres d’AD, plus le parti gagnait du soutien parmi le public. En plus, du front unifié des politiciens majoritaires (du parti de la gauche radicale au centre-droit) et les médias contre AD donna à AD le statut d’un acteur anti-système et lui attira en conséquence le soutien de beaucoup d’électeurs qui rejettaient tous les partis dominants.

Cependant, la principale raison du succès d’AD est son action systématique pour la protection des pauvres grecs qui souffrent de la criminalité des immigrants illégaux, principalement dans le centre-ville d’Athènes. AD a suivi la recette politique du Sinn Fein et du Hamas, il travaille au sein de sa communauté (quelque chose que tous les autres partis politiques ont été indifférents à faire). Pendant des années les zones du ghetto d’Athènes ont été abandonnées par la police et le système politique. L’hégémonie idéologique de la gauche qui a été permanente dans la société grecque depuis 1974 assurait que quiconque se plaignant de l’immigration illégale était taxé de racisme, de xénophobie, et de néo-nazisme. En conséquence, aucun gouvernement, jusqu’à récemment, n’a pris de mesures sérieuses pour combattre l’immigration illégale et la grande criminalité des immigrés. Avec l’abscence de l’État grec et les Grecs du centre-ville d’Athènes et d’autres zones infestées d’immigrés (principalement les banlieues populaires et de la classe-moyenne basse d’Athènes) terrorisés à l’idée même de marcher seul après le coucher du soleil, une place à prendre se créa. Rapidement, les habitants désespérés de ces zones apprirent que les membres d’AD les escorteraient à l’épicerie locale et les protégeraient de la prédation des immigrés illégaux. Là où la police refusait d’agir, un appel aux bureaux locaux d’AD suffisait. Des zones entières de ghettos d’Athènes furent de nouveau sécurisées pour ses Grecs locaux par les actions violentes d’AD qui ont littéralement viré à coup de pieds les immigrés illégaux. Non seulement çà, mais AD commença à collecter de la nourriture et des vêtements et à les distribuer  uniquement aux Grecs, et elle surprit son monde en créant récemment une banque de sang et de production de sang, là encore seulement par les Grecs et pour les Grecs. De telles activités ont le soutien de la majorité de la population, même de ceux qui n’ont pas voté AD. 

Critiques par d’anciens membres 

Malgré la forte opposition des médias et du système politique contre AD, ses critiques les plus virulents restent ses anciens membres. Beaucoup d’entre eux parlent du chef d’AD comme d’un agent des services secrets grecs et décrivent son organisation comme une forme d’opposition contrôlée au système. Ils affirment aussi qu’AD a principalement été crée afin de rassembler tous les individus les plus radicaux d’extrême droite et de les faire surveiller. Ces accusations proviennent d’anciens membres qui était eux-même dans la hiérarchie d’AD. D’autres affirment que depuis qu’AD a abandonné son programme national-socialiste et acquit un programme national-patriotique il a donc trahi la cause. Même si de telles remarques sont avérées, le fait qu’AD a changé le paysage politique de la Grèce ne peut pas être nié. Son fort pourcentage électoral a forcé l’actuelle coalition gouvernementale à traiter sérieusement le problème de l’immigration illégale et pour la première fois depuis le début de l’invasion de l’immigration, l’État et la police ont essayé de la faire diminuer.

Le futur 

Donc qu’est-ce que le futur réserve à AD ? Quelques mois après les élections, les sondages montrent qu’AD est le troisième parti avec près de 15% des suffrages, en d’autres mots le parti a apparemment doublé son potentiel électoral. En fait, récemment un ancien premier ministre de Grèce (K. Karamanlis) semble avoir dit à son entourage qu’AD obtiendrait 20% des votes si les élections se tenaient maintenant. Malgré l’attitude négative des médias de masse (beaucoup refusent toujours d’inviter des représentants d’AD aux émissions politiques de débat) et de celles des partis politiques habituels, le soutien pour AD augmente surtout dans les arrondissements des classes populaires et de la petite bourgeoisie des grandes villes grecques, qui, comme nous l’avons expliqué plus tôt, souffrent le plus de l’importante criminalité des immigrés illégaux. Il y a juste quelques semaines un groupe de membres d’AD dirigé par des députés d’AD  a attaqué des vendeurs de rue immigrés qui vendaient leurs produits sans autorisation officielle. Le  tollé contre AD fut général parmi les médias et les politiciens, mais le syndicat officiel des vendeurs de rue grecs publia une déclaration de soutien pour les actions d’AD et les remercia publiquement.

Actuellement, la Grèce a un gouvernement de coalition gouverné par le parti de centre-droite, cependant en terme de suffrages la gauche radicale est le premier parti d’opposition et a de sérieuses chances d’être le prochain gouvernement du pays lors des prochaines élections. Avant que nous analysons ce que cela signifie pour la Grèce, il est important d’expliquer ce que la gauche radicale représente réellement. C’est une alliance de différents partis d’extrême gauche, principalement des Trotskystes, des Maoïstes, et d’autres gauchistes marginaux, alors que le parti est connu pour soutenir la violence d’extrême gauche et que ses députés aient défendu les émeutiers gauchistes et les terroristes dans les tribunaux. Il obtenait habituellement entre 3 à 5% des suffrages, mais dans les dernières élections les électeurs du PASOK (le parti de centre-gauche) qui sont surtout les nombreux fonctionnaires, ont voté pour la gauche radicale. La Grèce, avec la gauche radicale au pouvoir et AD proche de 15% subira d’énormes émeutes entre extrême gauche et extrême droite, émeutes qui peuvent même mener à une guerre civile de basse intensité, surtout si la crise économique empire. Une réaction par les services de sécurité et l’armée contre un gouvernement de la gauche radicale ne peut pas être écartée non plus.

Conclusion 

Au final, le phénomène AD fut le résultat d’une multitude de facteurs dont la crise économique n’en est qu’un parmi d’autres. Une organisation marginale avec quelques centaines de membres s’est transformée en une nuit en un acteur politique majeur de la politique grecque. Le futur de la Grèce au milieu de la crise économique et des taux de chômage record ne paraît évidemment pas brillant. Les nouvelles mesures d’austérité du gouvernement feront stagner davantage l’économie et exaspéreront la population grecque. Cependant, la crise s’est transformée en opportunité pour le nationalisme grec et pour AD en particulier, comme le proverbe anglais le dit, “il y a toujours une lumière au bout du tunnel.” Ab Aeterno continuera de surveiller et de rendre compte des développements politiques et de l’ascension d’AD.

Source: Ab Aeterno, no. 12, été 2012.